Donc, la dernière suite :
En tout, après cette première hospitalisation, il y en a eu deux autres en plus d'une en hopital de jour. Je ne peux pas dire que ça m'ait réellement aidé, mais il y a eu tout de même quelques médecins et infirmières qui eux m'ont aidé à prendre conscience de certaines choses, au contraire de d'autres membres du personnel là-bas qui selon moi devraient changer de métier. Enfin bref...
Après une tentative de suicide supplémentaire ( qui a été la cause de la troisième hospitalisation ) je me suis rendue compte que si j'avais réussi, j'aurais fait vivre à ma mère et à ma famille ce que moi-même j'avais vécu après le suicide de mon père. Que ce n'est pas parce que ma vie était difficile pour le moment qu'elle le resterait éternellement, et je ne voulais pas rendre difficile celle de mes proches.. Résumé en quelques lignes comme ça, ça peut paraître banal ou facile à décider. Mais en vrai, ça m'a pris longtemps avant d'en venir à ce point-ci. Après, ce fut la fin des tentatives de suicide. Je ne dis pas que ce fut la fin des idées suicidaires, mais ça a été la dernière fois ou j'ai songé à les mettre en pratique, pour ne pas refaire vivre ça à ma mère surtout.. Je sais bien qu'il vaut mieux le faire pour soi-même en premier, mais une raison d'arrêter même si ce n'est pas celle qu'il faudrait vaut mieux que pas de raison du tout.
Même si la question du suicide était réglée, ma vie n'en était pas plus organisée pour autant.. Je m'enfonçais toujours dans les troubles alimentaires et dans l'automutilation malgré les hospitalisations et les reprises de poids, malgré les suivis et etc..
J'avais un horaire de cours flexible, en particulier après les sorties d'hospitalisations ou d'hopital de jour, mais surtout car je ne pouvais plus suivre le rythme des études à temps plein. De toute façon, ça ne m'intéressait plus du tout. Il n'y avait d'ailleurs plus beaucoup de choses qui pouvaient encore m'intéresser à ce moment-là. Si j'avais pu choisir de vivre ma vie entière à dormir chez-moi, je crois qu'à cette période c'est ce que j'aurais fait.
Les mois ont passés, puis est arrivé le moment ou j'ai eu l'âge légal d'arrêter les cours. Je l'ai fait, en prévoyant par contre me trouver un emploi dès que je le pourrais.
J'en ai finalement trouvé un quelques mois plus tard, mais avec l'anorexie, la boulimie et ce qui va avec, ma santé n'était pas assez forte pour occuper un poste temps-plein. J'ai réduis le nombre d'heures, pour finir par devoir changer de travail pour un qui serait moins dur sur le plan physique. Ça a quand même eu l'avantage de me faire sortir de chez-moi et d'améliorer ma timidité de façon assez importante. Ça m'a aussi aidé pour les emplois que j'aurais pour la suite.
Vu que j'avais laissé mon emploi et que ce n'était pas tout de suite que j'allais en retrouver un autre, je passais mes journées seule à la maison, ce qui est une situation favorable pour s'enfoncer davantage dans les tca's et vouloir de moins en moins sortir.
À un moment, je me suis mis à vomir du sang, au début presque pas, mais à la fin...
Bref, je vous passe les détails mais j'ai dû aller passer des examens d'urgence à l'hôpital et, sans surprise, les médecins m'ont annoncé qu'après des années ( car à ce moment là ça faisait déjà longtemps que j'étais anorexique-boulimique ) à me faire vomir à tous les jours, j'avais l'oeusophage et l'estomac dans un sale état. Ce qu'ils m'ont dit par la suite m'a fait un choc par contre..
Je savais qu'avec cette maladie on ne peut pas garder une santé parfaite, mais je n'avais jamais pris réellement conscience du risque sérieux pour la vie que ça entraîne. Ils m'ont dit que si je continuais, ce ne serait plus uniquement des lésions que j'aurais, mais une perforation de l'estomac qui est généralement fatale.
Donc, soit j'arrêtais les vomissements et les dilatations de l'estomac trop importantes qu'engendrent les crises de boulimie les plus fortes, soit j'en mourrais..
Si je vous disais que la décision a été facile à prendre et qu'aussitôt j'ai paniqué en me disant " oh non, pas ça, je vais arrêter ", je mentirais.. Et ça ne sert strictement à rien d'écrire son histoire si c'est pour se montrer sous un meilleur jour lorsque ce n'est pas le cas.
Au début, après cette nouvelle, j'ai trouvé l'idée tentante, aussi aberrant que cela paraisse aujourd'hui.
Je me disais que ce serait facile, et je me donnais bonne conscience en me disant que ce n'était pas un suicide si c'est l'estomac qui lâchait.
Mais en voyant ma mère paniquer en me disant que je savais que ça allait arriver et que si j'abandonnais ce serait un suicide. Lorsqu'elle m'a dit de me rappelle la promesse que je lui avais faite, par amour pour elle j'ai décidé de continuer à vivre pour la seconde fois.
Alors l'étape de la réalimentation est arrivée.. Ceux qui ont eu à le faire savent à quel point c'est pénible, car l'estomac n'est plus habituée à garder les repas, donc plus habituée à vraiment les digérer.. Néanmoins, ça m'a sauvée la vie.
Évidemment, vu que je n'avais plus ça comme moyen de gérer tout ce qui n'allait pas, les autres problèmes se sont renforcés, comme les crises d'angoisse, la dépression, etc.. Pendant les premiers mois, surtout. Après, ça s'est un peu estompé et j'ai commencé à vivre un peu plus pour moi plutôt qu'uniquement pour ma mère et la famille.
Même si je n'ai pas réussi à me sortir complètement de l'anorexie et de la boulimie, je n'ai jamais recommencé à me faire vomir même après six ans de cette pratique. Ça n'a pas été facile, loin de là, et encore aujourd'hui je dois souvent lutter contre ces envies après les repas ou après des craquages alimentaires, mais si je voulais faire quelque chose de bien de ma vie je n'avais pas le choix d'arrêter complètement...
Après la réalimentation, malgré quelques écarts ou sauts de repas, j'ai pris du poids que j'ai eu beaucoup de mal à accepter, mais je me suis retrouvé un emploi qui a duré quelques semaines, pour me faire sortir de la maison afin d'éviter de devenir complètement dingue et risquer les rechutes.
Aujourd'hui ça fait un an de ça. Une année pendant laquelle je suis maintenant fière d'avoir choisis de me sauver la vie ( et d'avoir réussi à le faire ) plutôt que de m'être laissée mourir comme j'en ai eu l'intention au début.
Une année pendant laquelle j'ai en plus décidé d'arrêter de fumer ( tant qu'à sauver.. lol ) et ça aussi, j'ai réussi...
Je ne dis pas que tout va bien dans le meilleur des mondes et que c'est " l'happy end " de l'histoire..
Je suis toujours anorexique-boulimique malgré qu'à présent je parviens à contrôler la majorité des comportements dangereux.
Je m'automutile toujours, même s'il y a certaines formes que j'ai arrêtées sans trop de rechutes jusqu'à maintenant.
Et je suis toujours en train d'essayer de recoller les morceaux : de découvrir vraiment qui je suis, ce que j'aime et ce que je vaux vraiment, après des années à être ce que les autres voulaient que je sois plutôt que ce que je suis réellement.
Je me suis donc pris une année de congé pour réfléchir à ce que je veux faire de ma vie, quel emploi pourrait me convenir en respectant les limites physiques et les séquelles que les années de troubles alimentaires ont laissées. ( Je ne les nommerai pas toutes, il y a un poste sur ça dans la section anorexie-boulimie, mais il y en a plusieurs.. )
Une année supplémentaire pour essayer de réparer ce qui peut l'être, tout en essayant d'apprendre à accepter ce qui ne peut pas l'être..
Bref, une année pour prendre soin de moi autant au niveau santé physique que mentale.
Voilà, c'était mon histoire..
C'est la première fois que j'arrive à l'écrire complètement, et ça m'a fait du bien de le faire. En mettant tout ça sur papier ( ou plutôt sur forum ), ça m'a permis de me rendre encore plus compte de tout le chemin que j'ai fait, du début à aujourd'hui, même si ce n'est pas encore parfait. Mais après tout, c'est normal qu'il reste beaucoup à faire car je suis quand même partie de loin.. J'ai encore du mal à m'accorder le crédit de ce que je fais de bien, mais je crois que je peux être fière.
Un grand merci pour votre écoute, votre support et.. votre patience pour réussir à lire ça
Si cette dernière partie a pu peut-être aider certaines personnes, ne serait-ce qu'en montrant qu'il est possible de réussir à améliorer les choses même lorsqu'on croit que c'est impossible, ça aura été encore plus utile que je le croyais.
Pour finir, si vous avez parfois besoin de parler ou de conseils, ça me fera plaisir d'être là. Le recul peut aussi servir à ça, même si je ne me prétend aucunement psy, ni même guérie.. Seulement capable d'écouter et de faire au mieux que je peux.