Une boule dans le ventre. L'envie. Envie de recommencer. J'ai tenté de me persuader que non, il ne faut pas. Mais très vite je suis arrivée à la conclusion que c'est une bonne chose. Je commence donc à m'installer : j'emprunte soigneusement une lame à mon rasoir en l'arrachant. Une esquisse de sourire se dessine sur mon visage. Mon cœur s'emballe. J'empoigne fermement l'objet de ma convoitise entre mes doigts. Ma respiration s'accélère, j'affiche désormais un large sourire. Je plante avec tout l'amour du monde cette lame tranchante sur ma cuisse, avec des étoiles plein les yeux. Je suis bien. Je suis bien. Je suis là, et je me sens bien. J'appuie avec tout mon courage, avec toute ma détermination. Un coup sec. Du sang. Ce sang qui représente ma souffrance, à l'équivalent d'une saignée d'antan, je fais sortir tout ce qu'il y a de plus impur de moi. Ce sang le voici qui perle sur ma jambe; qui suit son chemin, doucement, suintant sur ma peau comme pour me laisser le temps d'être fasciné par cette magie l'espace d'un instant. C'est l'euphorie. Je suis bien. Je suis bien. Je suis là, et je me sens bien. Je répète ce geste, encore, encore, et encore. Je vais bien, maintenant, je vais bien. Du sang, du sang partout. C'est l'œuvre de ma vie. Ce sang sur mes mains. Je suis fasciné. Je le contemple. Je prends mon temps, je suis fascinée. Fascinée par mon bonheur. Je vais bien. Je suis là et je vais bien. Je jette les mouchoirs qui m'ont servis pour éponger ma souffrance. Je m'allonge sur mon lit. Euphorique. Je suis heureuse. Je me sens vivre. Je touche avec toute la délicatesse qui m'est était donnée. Je touche comme on toucherais un bourgeon de rose, comme on effleure la joue de son amante à son réveille. Je touche tendrement. J'effleure. Je suis fascinée par tant de beauté. Je suis là, et je vais bien. Je m'endors, le sourire aux lèvres. Je me suis rapprochée du paradis, l'espace d'un moment. Je recommencerais demain. Mais pour le moment, je vais bien.