Prélude [Attention AM + TCA décrit cruement]

Voici le prélude du livre que j'écris. Revu et corriger.

Si vous trouvez que ça d'écrit trop l'AM, je vais l'enlever. C'est pas grave.
Mais sinon, j'aimerais avoir quelques impressions. Comment vous trouvez le texte ?


[Attention, ne pas lire si vous êtes sensible, description d'AM et de la sensation avant, pendant et après. Description de TCA aussi.]





Prélude

Vendredi 8 juin 2007 à 20:50

Il ne resta rien de moi. Ni douleur, ni tristesse, ni joie, ni rien. Un grand et sombre vide.


L’automutilation. Un bien grand mot, trop mal interprété et mal compris. Comment définir ce mal-être trop profond? Je ne sais même pas pourquoi cette « idée » m’est venue. Pour quels raison et comment j’en suis venue à prendre cette petite lame et faire cette si petite incision sur mon bras gauche. Je ne peux pas me souvenir si j’avais déjà entendu parler de ça ou vu ça avant. Je ne me souviens que d’une chose : la douleur.
La douleur. Enfin un « sentiment », enfin quelque chose que je peux ressentir dans mon néant intérieur. À l’instant même, au fond de moi, j’ai su que ce pourrait être une chose, une chose sur laquelle je pourrais enfin avoir le contrôle. Le contrôle. Pouvoir à nouveau « ressentir ». Être « moi », être « vie ».

Être « vie ». Je ne voulais pas mourir. Pas vraiment. J’étais déjà morte. Morte de sentiments, de sensations, de pensées. Je voulais vivre! Vivre. Une soif de vie criante enfermée très loin, toute au fond de moi. Cette prison de vide dont j’avais égaré la clé et le moyen d’en sortir.
J’ai alors cru avoir trouvé un moyen détourné. Un moyen qui me permettait de ressentir à nouveau. D’être un être humain. Donc d’ « être ». D’exister. À partir de ce moment : un flot de sentiments qui affluent, qui submergent. Une tempête de sentiments mélangés. Tout y passe. L’euphorie hystérique laisse place à la crise de larmes. Puis à nouveau la joie! L’allégresse. Une contemplation morbide du vide. La honte. La tristesse, la douleur. Le vide.

Comment expliquer? Ça devient vite comme une drogue. La seule échappatoire. Le moyen. Le soulagement inespéré. À ce stade, il n’est même pas question de s’en empêcher ou même de le vouloir. Il faut le faire. J’ai besoin de le faire. Besoin de ressentir. Ressentir? En fait, cela ne fait même pas mal. La lame ne coupe pas assez? Suffit de repasser plus souvent et plus fort. Encore. Encore. Pas de douleur. Le sang. Le soulagement. La contemplation morbide du vide. La honte. La douleur, la tristesse.

C’est une sorte de rituel. Il faut attendre. Attendre qu’il n’y ait plus personne. Attendre que tout le monde soit couché. Attendre. Il faut ranger la pièce. Aller prendre une douche très chaude, brûlante. Sortir. Revenir dans la pièce. Prendre la lame et couper. Couper. Couper. Encore. Plus fort. À plusieurs endroits. Couper. Le sang. La contemplation morbide du vide. La honte. La douleur, la tristesse. L’épuisement. Dormir. Se lever. Le vide.

Le rituel est là, mais pas nécessairement obligatoire. Parfois il n’est pas possible d’attendre. Parfois la pièce est trop loin. La lame, elle est tout près. Toujours dans le sac, à porter de main. Il n’est pas possible de l’apporter? Trop dangereux à l’école? Une règle de métal fera l’affaire. Pour cette fois.

Peu importe ce qui déclenchera la crise. Un mot, une image, un son, un acte. Il suffit de s’isoler aux toilettes et de prendre la lame. Coupé juste un peu. Une ligne de plus sur ce bras où il ne reste déjà que trop peu de place. Ce sera bientôt le tour de cet autre bras, puis de cette jambe. L’épaule. Juste un peu. Soulagement.

Le contrôle. Contrôler la douleur, ce nouveau sentiment. Cette délicieuse douleur. Cette sensation de vie. Contrôler ce sang qui coule. Ce flot de vie. Le contrôle. Est-ce vraiment un contrôle? Le pouvoir sur la souffrance, sur la mort. La vie. Impossible de s'en passer. Impossible d'arrêter. Encore, toujours. C'est de plus en plus violent. De plus en plus de sang. Où est le contrôle? Tout ce sang. Partout. La peur. Il faut arrêter! Arrêter? Comment? Arrêter, vraiment? Pourquoi? Tout va bien. Je vais bien. Pourquoi arrêter? Il n'y a pas de danger. Le contrôle.

Un cercle sans fin de douleur, de honte, de tristesse, de vide. De dégoût. Dégoût de ce corps. De cette enveloppe de chaire trop lourde à porter. Pourquoi le nourrir? Pourquoi se forcer à manger alors que la faim n’y est plus depuis un moment déjà?

Puis, c’est le ventre qui souffre. Une douleur difficile à décrire. D’abord les intestins. Trop douloureux de manger. Puis, l’estomac. Trop douloureux de ne rien manger. Vient le temps de se forcer à manger. Puis de ne plus se forcer. Manger. Manger. Manger. Encore.

Pour quelle raison*

De cette enveloppe de chair*

"Peu importe ce qui déclenchera la crise. Un mot, une image, un son, un acte. Il suffit de s’isoler aux toilettes et de prendre la lame. Coupé juste un peu. Une ligne de plus sur ce bras où il ne reste déjà que trop peu de place. Ce sera bientôt le tour de cet autre bras, puis de cette jambe. L’épaule. Juste un peu. Soulagement."

Je me reconnais là-dedans .

J'aime bien ta facon d'écrire même si ca se voit que c'est ton vécu à toi .. fin je sais pas l'expliquer .

Continue ainsi

Ellouh a écrit:

Je me reconnais là-dedans .

J'aime bien ta facon d'écrire même si ca se voit que c'est ton vécu à toi .. fin je sais pas l'expliquer .

Continue ainsi

Merci
C'est exactement ce que je voulais savoir! Si je décris suffisamment bien pour qu'il soit possible de s'y identifier au moins un peu.