Hey,
Ça fait très longtemps que je n'ai rien écrit dans un autre contexte que celui du journal intime ou du RP (et le RP lui-même a toujours été difficile et piétine ces derniers mois) alors j'essaie, pour voir... Le truc ci-dessous, je viens de le finir en essayant de pas trop me casser la tête.
Puis j'avais commencé un blog de dessins aussi mais il est à l'arrêt depuis que je ne me décide pas à faire un pas dans le bureau où il y a le scanner : http://notbene.over-blog.com/
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À la lisière du pays boueux, le contrôleur marchait de long en large en faisant tournoyer sa matraque.
« Halte, hurla-t-il, qui es-tu ?
— Je suis un mot.
— Tes papiers ?
— Vous plaisantez ?
— Autorisation spéciale du gouvernement ? Lettre de recommandation du centre de la pensée ? Tu crois que tu peux apporter quelque chose à la discussion ? Tu es pertinent ? Spirituel ?
— Mais le temps d'aller chercher tout ça, le moment propice pour me placer dans la discussion sera passé depuis belle lurette ! Laissez-moi faire mon travail !
— Non. Circulez ! »
Un peu plus tard, le contrôleur interpellait un autre inconnu :
« Halte ! Qui es-tu ?
— Un mot.
— Tes papiers...
— Ouais, j'ai cette missive.
Le contrôleur se mit à lire :
— En raison d'une récente réforme... blablabla... le gouvernement ayant estimé qu'un assouplissement du contrôle à la frontière se justifiait... blablabla... nécessité de sortir du repli sur soi-même et de créer des relations solides avec les autres gouvernements... Oui, bon, des foutaises ! Des réformes, ils nous en pondent tous les deux jours : au premier couac, l'esprit imagine les pires scénarios possibles, ça se met à pleurnicher là-haut et tout le blâme retombe sur nous ! Quoi qu'on fasse, y a pas moyen de gagner avec ces gens-là !
— En attendant, je peux passer ?
— Grmblm... sale pays... je déteste cette affectation... pas moyen de me faire muter...
— Ohé ?
— ...
— HÉ !
— Oui, oui, c'est bon, tu peux passer ! Merde, à la fin ! »
En grommelant, le mot passa la frontière. Deux minutes plus tard, il revenait, l'air furieux.
« Qu'est-ce que tu fous là ? fit le contrôleur, toujours aussi aimable.
— Figurez-vous que je me tape tout le chemin et que la voix n'a même pas été fichue de me prononcer correctement ! Personne ne m'a compris, j'ai plus qu'à rentrer au cerveau, je n'ai servi à rien et comme d'habitude, ça va être de notre faute !
— Ouais, je te comprends, l'ami. Quel sale pays ! »
Le calme retomba. Au bout d'un moment, la voix désincarnée d'un collègue interpella le contrôleur à travers la brume :
« Francis, ils ont annoncé une mesure spéciale — encore une — le gouvernement est découragé, ne laisse plus passer personne pour une durée d'au moins cinq minutes.
— C'est gai ! Je sens que la brume n'est pas près de s'éclaircir ! »
Quelques pénibles minutes s'écoulèrent. Un bruit de course se fit entendre, puis une autre voix lança :
« Hé !
— STOP ! rugit le contrôleur exaspéré, personne ne passe, mesure spéciale !
— C'est moi, Robert, le messager du centre de la vue, je suis là pour te prévenir qu'ils ont annulé la mesure spéciale d'il y a quatre minutes parce qu'une personne avec un chien vient d'entrer dans la pièce.
— Un chien ?
— Ouais, tu penses bien, ils sont tout énamourés là-haut. Donc ils vont envoyer des mots, ne les refoule pas ! »
Effectivement, les mots ne se firent pas attendre :
« Je viens pour dire bonjour...
— Je viens pour demander à caresser le chien...
— Oui oui, c'est bon, passez !
— Hé, Francis, lança la voix du collègue, viens voir ça sur les écrans de contrôle, comme il est mignon !
— Ah non, hein ! Il faut bien que quelqu'un reste en charge. J'ai pas que ça à faire.
— Non mais viens voir...
— Non !
— Bon, ben, reste là. Oooh, il nous fait la fête !
— Qu'il est beau ! fit un autre collègue.
— Huhu, il nous montre son ventre !
— On dirait qu'il nous aime bien ! »
Intéressé malgré lui, le contrôleur se rapprocha imperceptiblement des écrans pour jeter un coup d’œil et quelques autres mots en profitèrent pour passer silencieusement la frontière.
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